Demain 28 janvier 2025 marquera le premier anniversaire de l’annonce du retrait des pays de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Conformément aux textes de l’organisation sous régionale, le retrait sera effectif le 29 courant après la notification du retrait et l’absence de changement d’avis des membres qui tiennent à s’en aller. En une année, beaucoup de choses ont été tentées pour retenir les partants. Dans le même temps, des actes ont été posés par ceux qui se mettent en retrait pour prouver que leur départ est irréversible. En une année, le « Je t’aime, moi non plus » a prévalu entre les partenaires d’hier.
Le désamour a commencé avec la création, le 16 septembre 2023, de l’Alliance des Etats du Sahel (AES). Une organisation de défense regroupant le Burkina, le Mali et le Niger qui s’étendra après à la diplomatie, à l’économie, aux infrastructures, etc. Le 28 janvier 2024, coup de tonnerre ! Les pays membres de l’AES annoncent leur retrait avec « effet immédiat » de la CEDEAO. Outre les sanctions jugées inhumaines infligées par l’organisation sous régionale à ces pays suite à des coups d’Etat, il est reproché à cette dernière de ne pas faire assez contre le terrorisme auquel ils font face.
Depuis lors, comme un bateau qui s’éloigne du rivage, les pays de l’AES ne font que prendre leurs distances. La CEDEAO n’a de cesse de faire savoir qu’il n’y a pas « d’effet immédiat » en matière de retrait mais d’un « effet progressif ». Les pays en question n’en ont cure. Pour eux, l’organisation sous régionale relève désormais du passé. A ceux qui espèrent toujours les voir revenir avant la période d’observation d’un an, ils assènent que leur retrait est « irréversible ». Tout en parlant, ils posent des actes qui ne trompent pas sur leur détermination à faire cavalier seul.
Ainsi, l’AES a tenu, le 6 juillet 2024 à Niamey (à la veille d’un sommet de la CEDEAO), le premier sommet du Collège des chefs d’Etat de l’Alliance. A cette occasion, la création d’une confédération a été actée ainsi que celle d’institutions comme une banque d’investissements. Déjà, un pays comme le Burkina a rendu opérationnelle sa Commission nationale de la Confédération des Etats du Sahel (CN-CES). Son président, l’ancien ministre Bassolma Bazié, a été nommé et installé en ce mois de janvier. A son tour, il vient d’installer deux de ses trois vice-présidents.
L’approche du premier anniversaire du divorce a été marquée par deux annonces qui douchent tout espoir de réconciliation. La première est la création « dans les semaines à venir » d’une « force unifiée » de l’AES de 5 000 hommes. L’information a été donnée le 21 janvier dernier à la télévision nationale du Niger par le ministre d’Etat, ministre de la Défense nationale de ce pays, le Général Salifou Modi. Au cours de son entretien, le ministre a précisé que la force en question sera « dotée de moyens aériens, terrestres et de renseignement » ainsi qu’un système de coordination pour lutter contre le terrorisme dans le nouvel espace communautaire.
La deuxième déclaration notable est celle du 23 janvier du chef de l’Etat du Mali, le Général Assimi Goïta, qui est également le président en exercice de la Confédération des Etats du Sahel. Dans un communiqué, il a informé de la mise en circulation du passeport AES à partir du 29 janvier prochain. On aura remarqué que la date n’a pas été choisie au hasard. Elle est celle de l’entrée en vigueur effective du retrait conformément aux textes de la CEDEAO.
La date du 28 janvier 2025 a été aussi choisie pour des meetings de soutien dans les pays membres de l’AES. Ce jour-là, les soutiens des chefs d’Etat de ces pays vont se retrouver pour exprimer leur soutien aux autorités, à l’AES et marquer la rupture avec la CEDEAO.
On ne va passer sous silence la réunion des ministres des Affaires étrangères de l’AES tenue le 26 janvier à Ouagadougou sur les modalités de séparation avec l’organisation sous régionale. En un mot comme en mille, il n’y a aucun espoir de voir les pays de l’AES retourner dans l’immédiat à la CEDEAO. Ils tracent leur sillon malgré les appels à reconsidérer leur décision, les bons offices de pays mandatés par la CEDEAO comme le Sénégal, le Togo. Ou encore du Ghana qui s’est autosaisi de la question avec la récente nomination, par le nouveau président John Dramani Mahama, d’un envoyé spécial du pays auprès de l’AES.
La CEDEAO elle-même a fini par faire contre mauvaise fortune, bon cœur. Le 13 janvier dernier, le président de la Commission de l’organisation, Dr Omar Alieu Touray, a adressé une correspondance au ministre malien des Affaires étrangères pour l’inviter à des discussions sur les modalités de séparation. C’est donc tout dire du réalisme auquel la CEDEAO a fini par s’y résoudre.