La fin du mois de juillet a coïncidé aussi avec la … fin du procès du massacre du 28 septembre 2009 en Guinée Conakry. C’est ce jour-là (31 juillet 2024) que le Tribunal pénal de Dixinn a rendu son verdict du procès qu’il a mené près de deux (02) ans et qui a tenu la Guinée en haleine et même l’extérieur. Les figures de proue de ce procès marathon ont été toutes reconnues coupables et condamnées à de lourdes peines pour certaines d’entre elles.
Ainsi, l’ancien chef de l’Etat, Moussa Dadis Camara, a été condamné à 20 ans de prison pour crimes contre l’humanité. Son ancien aide de camp, Aboubacar Sidiki Diakité dit Toumba, a écopé de dix (10) ans de prison. Moussa Thiegboro Camara a été condamné à 20 ans de prison. La réclusion criminelle à perpétuité, autrement dit la prison à vie, a été prononcée à l’encontre du colonel Claude Pivi, ancien ministre de la Sécurité présidentielle. Un mandat d’arrêt international a été décerné contre lui pour s’être évadé, en novembre 2023, pendant que le procès était en cours.
Bien que les faits soient graves, tous les accusés n’ont pas été condamnés. Il y a eu des acquittements au profit de quatre (04) accusés qui ont été déclarés non coupables des faits pour lesquels ils étaient poursuivis. La procédure a été abandonnée à l’encontre de deux (02) autres pour cause de décès. Les massacres à l’origine du procès ont été perpétrés le 28 septembre 2009 en répression d’une manifestation de l’opposition qui s’était réunie au stade du même nom. Et ce, pour protester contre la volonté du chef de l’Etat de l’époque, Moussa Dadis Camara, d’être candidat à l’élection présidentielle de fin de la Transition. Le déchainement de violence a causé la mort d’au moins 156 personnes et favorisé le viol de 109 femmes.
L’épilogue du procès doit sonner comme un rappel aux tenants du pouvoir en Guinée qu’ils peuvent être toujours rattrapés par les actes qu’ils posent en étant aux affaires. Qui eût cru que Moussa Dadis Camara, qui a « ramassé » le pouvoir en fin 2008 après le décès du président Lansana Conté, allait se retrouver un jour devant la Justice de son pays ? La Guinée est caractérisée depuis son indépendance par la violence en politique.
De Sékou Touré à l’actuel chef de l’Etat, Mamadou Doumbouya, en passant par Conté et Alpha Condé, chaque régime a toujours réprimé ceux qui lui sont hostiles ou considérés comme tel. Certes, sous le premier président du pays, il n’y avait pas de multipartisme pour que l’on puisse parler de pouvoir (ou de majorité présidentielle) et d’opposition. Mais la répression, la violence en politique était déjà là avec les arrestations, les emprisonnements, les assassinats à tour de bras de personnes présentées comme subversives, ennemies de la nation.
Il y a eu une détente sous Lansana Conté qui a ouvert les geôles de son prédécesseur et libéré ceux qui avaient eu la chance de survivre aux dures conditions de détention du sinistre camp Boiro. Mais par la suite la violence a refait surface à la faveur du vent de la démocratie qui a commencé à souffler sur le continent africain au début des années 90. Les revendications de libertés, les contestations de résultats d’élections, ont été souvent réprimées dans le sang. Malheureusement, cela se poursuit de nos jours avec les militaires au pouvoir à Conakry qui n’hésitent pas à mater certaines manifestations de l’opposition dont c’est essentiellement le seul moyen de se faire entendre.
Il faut reconnaitre que la répression au Stade du 28-Septembre en 2009 reste de loin la plus féroce au pays de Sékou Touré. Sa nature aveugle et bestiale, le nombre de victimes, la placent dans les tristes annales de l’histoire. D’ailleurs, ce n’est pas pour rien que les faits qui étaient qualifiés, entre autres, de meurtres, de viols, etc. ont été requalifiés en crimes contre l’humanité.
C’est la raison pour laquelle le procès et le verdict qui en est issu doivent servir de leçon aux tenants du pouvoir en Guinée qui ont un recours systématique à la violence comme mode de gouvernance. Les mœurs politiques y ont été suffisamment violentes qu’il faille les adoucir maintenant. Cela est valable pour les autres pays africains qui sont dans la même situation que la Guinée.