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Levée de l’immunité de Mohamed Bazoum : L’ancien président, seul face à son destin

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L’actualité nigérienne a été marquée le 14 juin dernier par la levée de l’immunité présidentielle de l’ancien chef de l’Etat, Mohamed Bazoum. Ce jour-là, la Cour d’Etat a fait droit à la requête du commissaire du gouvernement près le Tribunal militaire de Niamey qui a été examinée le 7 juin. Le départ de la salle des avocats de l’ancien président n’avait pas empêché la tenue de l’audience au terme de laquelle la juridiction avait donné une semaine pour rendre son verdict. Et c’est ce qu’elle a fait en dépouillant l’ex-président de cette protection juridique qui le mettait à l’abri de poursuites pour des faits et des actes commis pendant l’exercice de ses hautes fonctions.

Avec ce délibéré, la Cour d’Etat, créée par les militaires au pouvoir, ouvre la possibilité d’un procès contre l’ancien n°1 nigérien. Ses tombeurs l’accusent de « complot d’attentat à la sécurité et l’autorité de l’Etat, crime de trahison, faits présumés d’apologie du terrorisme et financement du terrorisme ». Des chefs d’accusation dont on se demande s’ils n’ont pas un lien avec certaines déclarations de l’intéressé quand il était aux affaires.

On se rappelle, par exemple, d’une interview au journal Jeune Afrique dans laquelle il a laissé entendre que les terroristes qui écument le Sahel sont mieux équipés que certaines armées nationales. Cela avait fait jaser à l’époque. Mais la justice n’en fait pas cas officiellement. Elle évoque plutôt d’autres faits comme des coups de fil passés par Mohamed Bazoum au président français Emmanuel Macron et aux Américains pour leur demander de le libérer des mains de ses ravisseurs.

Après l’obtention de la levée de l’immunité, un boulevard s’ouvre donc pour le procès et il sera emprunté par ceux qui en veulent à l’ancien chef de l’Etat. On ne voit pas les militaires se donner toute cette peine pour obtenir cette levée et ne pas aller jusqu’au bout c’est-à-dire au procès. Et la tenue de celui-ci ne serait qu’une question de jour. A moins que l’éventualité ne soit utilisée comme un moyen de pression, un chantage, pour faire plier le chef de l’Etat renversé qui a refusé jusque-là de signer un document relatif à sa démission.

Avec ce qui vient de se passer, on peut dire que Mohamed Bazoum n’a pas eu la chance de ses homologues malien et burkinabè. Bien que victimes de coups d’Etat, feu Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), Ba N’Daw et Roch Kaboré n’ont pas subi ce sort. Après avoir été brièvement placés en résidence surveillée, ils sont devenus libres de leurs mouvements. L’exception est le lieutenant-colonel Paul Henri Damiba, tombeur de Kaboré, qui a été contraint à l’exil après avoir été à son tour renversé par le capitaine Ibrahim Traoré. Une liberté dont le prix a été d’accepter de signer sa démission pour permettre aux nouveaux pouvoirs de s’installer. En refusant de faire cela, l’ex-chef de l’Etat gêne les militaires qui n’ont pas pu obtenir une démission écrite du président démocratiquement élu.

Et c’est sans doute ce qui explique aussi l’inflexibilité, l’intransigeance du général Abdourahmane Tiani et ses frères d’armes concernant la libération du président renversé. Les appels à la libération de Mohamed Bazoum, les décisions de justice y relatives notamment celle de la Cour de justice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), sont restés lettre morte.

La CEDEAO a levé ses sanctions sans obtenir ladite libération. La voix de cette institution sous régionale est devenue davantage inaudible avec le départ du Niger en fin janvier dernier en compagnie du Burkina et du Mali qui, en septembre 2023, ont créé l’Alliance des Etats du Sahel (AES).

Dans cette affaire, l’ancien président se retrouve seul face à son destin. Il n’a personne pour le défendre véritablement. Ses partisans sont muselés et se terrent face à la … terreur du régime et de ses partisans qui vouent aux gémonies les hommes politiques et les voix jugées discordantes. Ses avocats ont beau dénoncer une violation de la procédure, celle des droits de leur client, rien n’y fit.

Les défenseurs des droits humains à l’interne sont devenus aussi aphones et prudents pour ne pas se faire taxer de valets locaux de l’impérialisme. Cette chape de plomb sur les libertés n’est pas spécifique au Niger depuis le putsch de juillet 2023. Elle est commune aux deux autres pays de l’AES qui sont dirigés par des militaires.

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